Les iles plastique

C’est l’histoire d’une mise en abime ultime. Celle d’un sujet, amas d’objets quotidiens en plastique transparent, posés là pour l’image dans leur forme la plus simple. Un ensemble vague, une île protéiforme, dérivant vers une destination incertaine. Ce plastique trivial, léger, c’est aussi ce monstre colonisateur qui asphyxie nos océans. Consommé à l’extrême, il est aujourd’hui voué à disparaître. Interdit et à la fois menacé par la raréfaction des ressources naturelles qui le constituent, et qu’il contribue pourtant chaque jour à détruire.

Série réalisée par

Marion Leflour : Photographie, Direction Artisitique

Bertrand Bourdaleix : Set Design

Texte : Marianne Ripp

Cette série interroge le paradoxe du plastique. Plastique et plasma, une même étymologie évoquant un état de matière désordonné. Comme si le plastique contenait dans son ADN toutes les forces contraires qui régissent le monde. Une matière perçue comme totalement artificielle  bien que dérivée de matières naturelles. Un polluant envahissant, pourtant roi de l’art et du design. Un médium ultra créatif, mais dont l’homme se voit aujourd’hui contraint de limiter la consommation. Que dire de cette transparence limpide, pureté d’apparat évoquant l’eau cristalline qu’il salit et contamine chaque jour. Ou encore de son potentiel hautement recyclable, qui s’amoncèle hideusement dans les mers, formant des décharges flottantes grandes comme plusieurs pays.

HENDERSON SOUTH PACIFIC

Nature morte. Ces paradoxes, j’ai voulu les saisir dans des images simples, une séquence courte et directe qui questionne notre environnement, notre relation à l’écologie, notre consommation, et notre rapport à l’objet artistique. Pour ce thème hautement sociétal, qui aurait pu être traité via un reportage de forme plus classique, j’ai volontairement opté pour une approche picturale, en résonnance avec la notion de « nature morte » dont il est littéralement question ici.

PALM

Entre pureté et ténèbres, le choix d’une lumière brumeuse et d’un fond bleu acier ne sont pas anodins pour induire cette dérive, cette pollution, évoquer les océans souillés, les glaciers et le réchauffement climatique. J’ai opté pour la transparence délicate du plastique afin de mieux révéler le contraste art/ordure : les objets photographiés deviennent eux-mêmes des déchets après la prise de vue, jusque leur saccage. Le plastique fondu couleur carbone, métaphore de marée noire, vient à son tour écraser l’œuvre de plastique.

TORREY CANYON #5

La boucle est bouclée. Les questions demeurent.

FLOE

REEF

ATOLL

SHELL

VANUATU #0

CONTINENT7 #1

CONTINENT7 #2

TORREY CANYON #1

TORREY CANYON #3

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